L’imbroglio continue autour de la vraie fausse démission du président de l’Assemblée populaire nationale (APN) algérienne, malgré les démentis de ce dernier et des dispositions réglementaires pas si souples.
La crise au sein de l’Assemblée populaire nationale (APN) se corse. Le chef du groupe parlementaire Nahda-Adala-Bina, Lakhdar Benkhellaf, a dénoncé mardi l’annulation par le ministère des Affaires étrangères d’une rencontre au Parlement entre l’association d’amitié algéro-japonaise qu’il préside et l’ambassadeur du Japon à Alger.
Le député a récusé cette immixtion du département des Affaires étrangères dans le fonctionnement de l’APN. Il a aussi révélé que le président de cette institution, Saïd Bouhadja, devait recevoir ce mardi l’ambassadeur de la Tunisie, mais cette rencontre a également été annulée.
>>> À LIRE – Algérie : le président de l’Assemblée nationale sur le départ ?
Quelques heures après cette sortie fracassante du parlementaire islamiste, l’agence algérienne de presse (APS) a tenté de rectifier le tir en imputant au président de l’Assemblée la décision de suspendre les activités programmées dans le cadre de la diplomatie parlementaire.
Une décision qui fait suite à la motion présentée par les présidents de cinq groupes parlementaires réclamant sa démission, a précisé l’APS, à savoir le Front de libération nationale (FLN, parti de Bouhadja), le Rassemblement national démocratique (RND) présidé par le Premier ministre Ahmed Ouyahia, le Mouvement populaire algérien (MPA) de l’ancien ministre du commerce Amara Benyounes, Tajamou Amal el-Jazaïr (TAJ) de l’ancien ministre des Travaux publics, et le groupe parlementaire des indépendants.
Empêcher Bouhadja d’accéder au Parlement ?
Après le blocage des activités du bureau de l’APN et le travail des commissions permanentes (la Commission des finances et des affaires juridiques a annulé ses réunions consacrées à l’examen du projet de loi de finances pour 2019), c’est aux prérogatives diplomatiques que s’attaquent désormais les auteurs de la cabale contre Saïd Bouhadja pour le contraindre à quitter son poste.
La prochaine étape, avancent certaines sources parlementaires, serait de l’empêcher d’accéder carrément au Parlement. Pour accentuer la pression contre Saïd Bouhadja, le FLN a décidé d’impliquer Mahdjoub Bedda, ministre chargé des relations avec le Parlement et membre du FLN. Ce dernier a assisté lundi à la réunion du bureau politique de son parti pour étudier les actions à mettre en œuvre afin « d’accélérer » le départ du président de l’APN.
Je ne suis pas contre le principe de mon départ, mais il faut que je sache s’il s’agit d’une démission ou d’un limogeage
Pour sa part, Saïd Bouhadja répète inlassablement qu’il ne démissionnera que s’il reçoit un coup de téléphone de celui qui l’a désigné à ce poste : le président de la République. « Je ne suis pas contre le principe de mon départ, mais il faut que je sache s’il s’agit d’une démission ou d’un limogeage. Il faut qu’on m’explique. La démission est un acte volontaire », a-t-il déclaré.
À quelles conditions peut-il perdre sa place ?
En vertu des dispositions de la Constitution, de la loi organique régissant les relations entre les deux chambres du Parlement et le gouvernement, ainsi que le règlement intérieur de l’institution, le président de l’Assemblée nationale est élu par ses pairs pour un mandat de cinq ans.
La séparation des pouvoirs dicte au président de la République de ne pas se mêler des affaires du Parlement. À ce titre, le président de l’APN ne peut être écarté du Perchoir que s’il présente sa démission, décède (constat de vacance), ou incompatibilité. Ce cas de figure, a priori ambigu, est expliqué par la constitutionnaliste Fatiha Benabbou comme un cumul de fonctions ou de mandats électifs.
Les députés n’ont aucun référent juridique sur lequel s’appuyer pour enlever à Saïd Bouhadja les commandes de la chambre basse
Les députés qui veulent la tête de Saïd Bouhadja n’ont aucun référent juridique sur lequel s’appuyer pour lui enlever les commandes de la chambre basse. Ils ont compté, au début de leur démarche, sur le retrait de confiance. Ils ont fait circuler une pétition, qui aurait récolté 320 signatures de parlementaires. Cette option a été abandonnée rapidement, car la procédure n’est prévue dans aucun texte réglementaire.
Selon des indiscrétions, Saïd Bouhadja aurait demandé aux chefs des groupes parlementaires qu’il a rencontrés dimanche de lui remettre une copie de ladite pétition afin de la soumettre au Conseil constitutionnel pour avis. Les députés frondeurs ont aussitôt fait marche arrière, choisissant une autre voie pour le forcer à partir. Depuis lundi, ils gèlent toutes leurs activités au sein de l’Assemblée nationale, déterminés à ébranler la résistance de Bouhadja.
Ja