Le président guinéen Alpha Condé se rend ce mois-ci aux États-Unis pour assister à l’Assemblée générale des Nations Unies et chercherait à encourager les investissements américains dans son pays.
M. Condé aura à cœur de mettre en avant l’amélioration des perspectives économiques de la Guinée attribuable au développement du secteur minier, qui devrait être prochainement suivi d’une croissance dans le secteur de l’électricité en raison de la mise en place d’une série de projets hydroélectriques.
Reste toutefois à savoir si l’incertitude politique actuelle quant à l’avenir de Condé entraînera de nouvelles atteintes aux droits. La constitution guinéenne de 2010 interdisant au président de briguer un troisième mandat, les partisans de Condé – y compris le parti dirigeant – lui ont demandé de modifier la constitution et de se représenter. Le 5 septembre, il a ordonné à ses ministres de mener des « consultations » sur une nouvelle constitution.
Si le gouvernement cherche effectivement à instaurer une nouvelle constitution, il est probable que la Guinée sera le théâtre d’une nouvelle série de manifestations de l’opposition qui, par le passé, ont souvent entraîné des affrontements violents entre les forces de sécurité et les manifestants. Ainsi, lors de manifestations en 2018, les forces de sécurité ont abattu au moins 12 personnes, les manifestants ayant quant à eux tué deux agents des forces de l’ordre.
Alors que les tensions politiques s’intensifient, certains éléments semblent indiquer que, pour réprimer la dissidence, le gouvernement est disposé à porter atteinte aux droits humains. Le gouvernement a pour ainsi dire interdit toutes les manifestations de rue. Les forces de sécurité ont lancé des bombes lacrymogènes contre ceux qui ont défié cette interdiction et arrêté des dizaines de manifestants opposés à l’adoption d’une nouvelle constitution.
Le gouvernement n’a guère pris de mesures pour s’assurer que les forces de sécurité qui ont commis des atteintes à l’encontre de manifestants soient tenues de rendre compte de leurs actes. Il n’a pas traduit en justice les militaires impliqués dans le massacre du Stade de 2009, lors duquel plus de 150 manifestants pacifiques ont été tués. Si le gouvernement tient à faire preuve d’un véritable engagement à l’égard de la lutte contre l’impunité, il devrait fixer la date du procès relatif au massacre et instaurer un panel spécial de juges chargé d’enquêter sur les atteintes plus récentes commises lors de manifestations.
Lors de leur rencontre de ce mois avec le président Condé, les dirigeants et les décideurs politiques mondiaux devraient faire valoir que le respect de la liberté des opposants au gouvernement est primordial. Ils devraient exhorter le président à lever toute interdiction générale de protester et n’interdire les manifestations que si le maintien de l’ordre public l’exige.
Seul le président Condé sait ce qu’il envisage pour son avenir politique. Mais les Guinéens de tous bords ont le droit d’exprimer leur opinion à un moment si critique pour la démocratie en Guinée. Ils ont également droit à ce que justice soit rendue lorsque les forces de sécurité sont responsables de morts illicites.
HRW