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En Guinée, une dizaine de morts dans les protestations contre un troisième mandat d’Alpha Condé

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Les autorités guinéennes ont reconnu, mercredi 16 octobre, qu’une dizaine de personnes avaient été tuées lors des manifestations contre une réforme possible de la Constitution. Le président Alpha Condé est soupçonné de vouloir la reformer pour briguer un troisième mandat présidentiel.

► Que se passe-t-il en Guinée ?

Depuis lundi 14 octobre, des manifestations se succèdent dans le pays contre un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé. Interdites par les autorités, elles sont durement réprimées par les forces de sécurité. Mercredi 16 octobre, le ministre de l’Administration du territoire, le général Bouréma Condé, a admis « au total environ neuf cas de décès, dont huit dans notre capitale, ainsi que de nombreux blessés ».

De son côté, le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), coalition de partis d’opposition, de syndicats et d’associations de la société civile, à l’origine des manifestations, a dénombré 10 morts côté manifestants, 70 blessés par balles et près de 200 arrestations. Human Right Watch note que depuis 2018, le gouvernement interdit de fait les manifestations de l’opposition en invoquant les risques pour la sûreté publique. « Les autorités locales ont interdit au moins 20 manifestations. Les forces de sécurité ont utilisé des gaz lacrymogènes contre les personnes qui défiaient l’interdiction, et ont arrêté des dizaines de manifestants », s’inquiétait déjà l’ONG de défense des droits humains, le 3 octobre.

► Quel est le sort des opposants emprisonnés ?

Mercredi 16 octobre, huit des principaux initiateurs de ces manifestations, interpellés samedi 12 octobre, ont été traduits devant le tribunal de première instance de Dixinn, un quartier de Conakry, placé sous haute protection à cette occasion. Ils ont affirmé avoir été victimes de traitements inhumains et dégradants au cours de leur garde à vue. Ils encourent de trois à cinq ans de prison pour avoir tenu des propos de nature à troubler l’ordre public en appelant à manifester, selon l’accusation. Le tribunal a reporté à vendredi, la suite de la procédure. Des procès identiques se sont tenus dans d’autres villes du pays, selon le FNDC.

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► Que veut Alpha Condé ?

Le nombre de mandat présidentiel est limité à deux par la Constitution. Soupçonné depuis des mois de vouloir briguer un troisième mandat à la prochaine élection présidentielle de 2020, Alpha Condé doit changer la Constitution s’il veut y parvenir. En septembre, il a demandé à son premier ministre, Ibrahima Kassory Fofana, d’organiser des consultations en vue d’une réforme possible de la Constitution.

Le 23 septembre, lors d’une rencontre avec la communauté guinéenne de New York, en marge de l’assemblée générale de l’ONU, Alpha Condé a été jusqu’à appeler les Guinéens à se préparer à un référendum et à des élections. Partagée sur Facebook, la vidéo de cette rencontre a enflammé les réseaux sociaux guinéens et accrédité la thèse d’un troisième mandat.

►Ces violences sont-elles nouvelles ?

Alpha Condé a été le premier président de la Guinée élu démocratiquement, en 2010, depuis l’indépendance de ce pays. Les années qui ont précédé son élection ont été marquées par des mouvements de contestations violemment réprimées. En 2006 et 2007, les syndicats avaient organisé des grèves pour protester contre la mauvaise gouvernance du président Lansana Conté. À plusieurs reprises, les forces de sécurité ont tiré à balles réelles sur ces derniers, tuant des dizaines de personnes.

En 2009, la grande manifestation contre la tentative du chef de la junte au pouvoir, Moussa Dadis Camara, de se présenter à l’élection présidentielle, a été réprimé dans le sang, tuant plus de 150 personnes. Sous Alpha Condé, un effort a été consenti par le pouvoir pour éviter ces affrontements violents. Toutefois, ils n’ont pas disparu comme en témoignent ceux de 2012-2013, avant les élections législatives : des dizaines de manifestants et de membres des forces de l’ordre avaient été tuées. De même, rappelle HRW, au moins douze personnes ont été tuées, et un grand nombre blessées, avant et après l’élection présidentielle de 2015.

La-croix.com