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Guinée: le président Condé annonce un référendum constitutionnel à hauts risques

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Le président guinéen Alpha Condé a fixé au 1er mars la tenue d’un référendum constitutionnel et de législatives, malgré l’intense contestation de l’opposition qui dénonce une manoeuvre pour briguer un troisième mandat fin 2020.

Le décret présidentiel a été lu mardi soir sur les médias d’Etat – télévision et radios -, provoquant une série de réactions outrées de l’opposition, qui entend empêcher le bon déroulement des législatives et de cette consultation constitutionnelle.

Lundi soir, un autre décret du chef de l’Etat avait annoncé que les élections législatives, prévues le 16 février après avoir été déjà maintes fois reportées, auraient finalement lieu le 1er mars.

L’annonce de la date du référendum, attendue depuis des semaines, risque d’accroître les tensions déjà vives dans ce pays de 13 millions d’habitants, pauvre malgré d’importantes ressources minières.

La Guinée est le théâtre depuis mi-octobre de protestations contre le projet prêté de longue date au président, élu en 2010 et réélu en 2015, de chercher à se succéder fin 2020. L’actuelle Constitution limite à deux le nombre de mandats présidentiels.

L’avant-projet de nouvelle Constitution divulgué en décembre et qui sera soumis à référendum dans moins d’un mois maintient cette limite. Mais l’opposition soupçonne que l’adoption d’une nouvelle Constitution serve à M. Condé de prétexte pour remettre son compteur présidentiel à zéro.

Alpha Condé, 81 ans, dénonce l’actuelle loi fondamentale, datant de 2010, comme un « concentré d’intérêts corporatistes » comportant des « lacunes et incohérences ». Alors que la communauté internationale, dont l’ONU et la France, s’inquiète des troubles dans le pays, il a récemment averti que « personne ne dicte à la Guinée ce qu’elle doit faire ».

« Rien de tout ce que fait Alpha Condé ne surprend. C’est à nous de faire ce que nous avons promis de faire », a déclaré mercredi à l’AFP le chef du Bloc Libéral (BL), un parti d’opposition qui boycotera les législatives. A savoir: « dénier » au chef de l’Etat la possibilité d’organiser « les élections à n’importe quelle date », « lui dénier le référendum sur la nouvelle Constitution et dénier à Alpha Condé le 3e mandat ».

– « Astuce » –

En revanche, un autre parti politique, l’Union des Forces démocratiques (UFD) a choisi de participer aux législatives, contrairement à la majorité de l’opposition, qui a décidé de boycotter et même d’empêcher la tenue du scrutin. Mais pour son président, Mamadou Bah Baadiko, le « couplage » des législatives et du référendum relève du « banditisme politique ».

« On va insister auprès de nos électeurs, on ne touche pas à un seul bulletin du référendum et on ne vote que pour les législatives », a déclaré M. Baadiko à l’AFP.

L’annonce du référendum le même jour que les législative va « enclencher une situation qui va être très difficile à gérer », selon Abdoul Gadiry Diallo, président de l’Organisation guinéenne de défense des droits de l’homme et du citoyen (OGDH). Dans un communiqué publié mardi, l’ONG avait estimé que « la paix et l’unité nationale n’ont jamais été aussi menacées en Guinée que maintenant ».

M. Condé garde jusqu’ici le silence sur ses intentions, ne disant pas s’il compte se représenter à la fin de l’année.

Mais l’éventualité d’un troisième mandat a fait descendre à plusieurs reprises dans la rue des dizaines, voire des centaines de milliers de Guinéens à l’appel d’un collectif de partis d’opposition, de syndicats et de membres de la société civile, le Front national pour la Défense de la Constitution (FNDC).

Le coordinateur national du FNDC, Abdourahmane Sanoh, estime que le couplage des législatives et du référendum n’est qu’une « astuce pour amener davantage de personnes aux urnes ».

« Ils veulent aller jusqu’au bout le 1er mars et le FNDC est prêt à aller jusqu’au bout pour empêcher qu’il y ait effectivement le référendum », a-t-il déclaré mercredi lors d’une conférence de presse.

Le mouvement a été plusieurs fois durement réprimé et s’est accompagné de troubles à travers le pays. Au moins 28 civils et un gendarme ont été tués depuis mi-octobre. Les manifestations ont toutefois été suspendue par le FNDC.

Opposant historique qui connut l’exil et la prison, M. Condé a été le premier président démocratiquement élu en 2010. Son avènement a marqué l’instauration d’un gouvernement civil après des décennies de régimes autoritaires et militaires. L’opposition dénonce toutefois une dérive « dictatoriale ».
Avec jeuneafrique