Le message colérique du Directeur général du groupe HADAFO MÉDIAS au CNT
Mesdames et Messieurs les honorables Conseillers,
Je suis sincèrement peiné,
En ma qualité de Directeur général du groupe HADAFO MÉDIAS, je viens de mettre au chômage économique plus de 70% du personnel à Conakry et à l’intérieur du pays.
Donc comprenez que très respectueusement, c’est avec un profond regret que je me vois contraint d’arrêter ma participation à cette rencontre. En effet, depuis plusieurs mois, le Groupe Hadafo Médias que je représente, tout comme d’autres de la presse en général, subit une violation flagrante des libertés consacrées par la Charte de la Transition que vous êtes censés défendre. Nos ondes sont systématiquement brouillées par les autorités, nos chaînes occultées des bouquets de diffusion, nous privant ainsi de nos annonceurs et nous obligeant à mettre plus de 70% de notre personnel au chômage pour motif économique.
Il est pour le moins paradoxal qu’après tant de mois d’indifférence, les honorables Conseillers se souviennent soudainement de l’existence d’un secteur aussi crucial que celui des médias, jugeant désormais opportun d’ouvrir le dialogue autour d’une problématique sociétale, certes préoccupante, mais bien dérisoire face à la menace imminente de disparition pur et simple des entreprises médiatiques avec elles des milliers d’emploies de guinéens.
C’est pourquoi, aussi préoccupante et regrettable que puisse être la question du partage de vidéos à caractère sexuel sur les réseaux sociaux, objet de la rencontre de ce jour, je ne puis accepter de continuer à y prendre part car la menace existentielle pesant sur les médias n’est pas encore levée. La fermeture de nos entreprises, qui plongent des familles entières dans la précarité en ces temps déjà difficiles, représentent une atteinte bien plus grave encore aux valeurs démocratiques et à la quiétude sociale.
Très respectueusement, que les honorables Conseillers ne s’y trompent pas, je ne remets nullement en cause la gravité du sujet proposé pour cette rencontre. Cependant, l’amertume et la consternation qui m’accablent actuellement ne me permettent pas d’aborder ces discussions avec la sérénité et l’ouverture d’esprit requises, après avoir apposé ma signature sur l’acte condamnant plusieurs de mes loyaux collaborateurs et leurs familles à l’incertitude des lendemains, exposés à l’indignité de ne plus pouvoir honorer le loyer, subvenir aux dépenses élémentaires, ni même se procurer la subsistance indispensable pour nourrir leurs enfants. Lorsque votre invitation portera sur ce sujet précis concernant les médias et cette tumultueuse période qu’ils traversent, il me sera bien entendu loisible de répondre favorablement à cette invite. Mais pour l’heure.
Par respect pour ces collaborateurs injustement sacrifiés et par attachement au principe même de la liberté d’expression, je me vois dans l’obligation de boycotter cette réunion, à laquelle le Groupe Hadafo Médias ne sera pas représenté.
Je vous prie d’agréer, Mesdames et Messieurs les Conseillers, l’expression de ma très haute considération.