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Guinée : la refondation ou l’art de refondre les promesses (Par Oumar Kateb Yacine)

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Ah la Guinée ! Ce pays qui semble avoir fait un pacte avec l’éternité… ou du moins avec l’éternelle transition. Depuis le 5 septembre 2021, les citoyens ont appris à maîtriser un nouveau sport national : attendre. Attendre les élections, attendre une constitution, attendre un semblant de clarté. Mais voilà que le Général Amara Camara, ministre Secrétaire général de la présidence, nous gratifie d’un chef-d’uvre lexical : « La Guinée n’est plus en transition, mais en refondation. » Si ce n’est pas de l’art politique, c’est au moins un bon début pour un manuel d’illusionnisme politique, où les mots remplacent les actes et où les promesses se refondent plus vite
La refondation : un concept nébuleux pour cacher le vide
Refondation, refondation Derrière ce mot, on pourrait presque entendre des violons jouer une symphonie d’espoir à la Flûte enchantée de Mozart. Mais soyons sérieux ! En guise d’orchestre, ce sont plutôt des tambours de confusion qui résonnent. Car cette « refondation » ne semble être qu’un euphémisme pour « statu quo prolongé ». Traduction libre : circulez, il n’y aura pas d’élections avant longtemps .
Quant à la fameuse constitution que le Conseil national de transition (CNT) devait réfléchir, elle semble avoir été égarée quelque part entre une promesse de campagne et un tiroir poussiéreux de la Transition, devenue Refondation. Trois ans et toujours on est au niveau de la vulgarisation d’un avant-projet de constitution? Même les plus lents des escargots auraient déjà tracé leur chemin vers une démocratie à la République bananière.
Un peuple pris hypnotisé par les slogans creux 
« Le renforcement de l’État ! » tonne le ministre Camara. « L’administration solide ! » martèlent les communiqués officiels. Et pendant ce temps, les Guinéens, fatigués de slogans aussi creux qu’une calebasse vide, n’attendent plus des mots mais des actes. Car voyez-vous, entre « refondation » et « réalité », …il ya un fossé que même les plus ambitieux des ponts chinois ne pourraient combler, tant il est construit sur des illusions et des promesses qui s’effritent au jour le jour.
 
Opposition : transition civile ou fiction politique ?
À cela s’ajoute une menace digne d’un scénario de film de série B : l’opposition promet une « transition civile » à partir du 1er janvier 2025. Mais attention, ne sortez pas encore le champagne. Dans le jargon guinéen, « transition civile » rime souvent avec « crise politique à rallonge ». Autrement dit, si vous espériez un miracle pour le Nouvel An, il faudra peut-être vous contenter des feux d’artifice.
Des carrefours, encore des carrefours
La Guinée, nous dit-on, serait à un « carrefour décisif ». Mais à force de tourner autour des mêmes ronds-points politiques, ne risquerait-elle pas de finir par s’installer sur le bas-côté ? Car pendant que les discours fleuris se succèdent et que les échéances se dérobent, ce sont les citoyens qui trinquent. Et pas avec du champagne, mais avec l’amertume de l’incertitude, ce breuvage que le pouvoir semble servir à volonté,
 
Au final
Peut-être qu’un jour, les dirigeants de la Guinée prendront une décision claire. Peut-être qu’une constitution verra le jour avant qu’un autre général ne décide que la « refondation de la refondation » est nécessaire. En attendant, les Guinéens sont condamnés à attendre. Bis. Et toujours. Bref, en Guinée, la démocratie est comme la météo : tout le monde en parle, mais personne ne la voit venir.
Au final, la Guinée ressemble à un éternel chantier où les outils sont là, mais les ouvriers semblent occupés à dessiner des plans qui ne se réalisent jamais. Une refondation sans fondement, des promesses sans lendemain : voilà le cocktail explosif que l’on continue de servir à un peuple qui, lui, n’a plus soif de promesses, mais d’actions concrètes et durables.
Oumar Kateb Yacine 
Analyste- Consulant Géopolitique