𝐆𝐚𝐛𝐨𝐧 𝐞𝐭 𝐆𝐮𝐢𝐧ée : 𝐃𝐞𝐮𝐱 𝐓𝐫𝐚𝐧𝐬𝐢𝐭𝐢𝐨𝐧𝐬, 𝐔𝐧𝐞 𝐕𝐢𝐬𝐢𝐨𝐧 𝐂𝐨𝐧𝐬𝐭𝐢𝐭𝐮𝐭𝐢𝐨𝐧𝐧𝐞𝐥𝐥𝐞 𝐃𝐢𝐟𝐟é𝐫𝐞𝐧𝐭𝐞 ?
La promulgation de la nouvelle constitution au 𝐆𝐚𝐛𝐨𝐧 𝐩𝐚𝐫 𝐥𝐞 𝐏𝐫𝐞́𝐬𝐢𝐝𝐞𝐧𝐭 𝐝𝐞 𝐥𝐚 𝐭𝐫𝐚𝐧𝐬𝐢𝐭𝐢𝐨𝐧, 𝐥𝐞 𝐆𝐞́𝐧𝐞́𝐫𝐚𝐥 𝐁𝐫𝐢𝐜𝐞 𝐂𝐥𝐨𝐭𝐚𝐢𝐫𝐞 𝐎𝐥𝐢𝐠𝐮𝐢 𝐍𝐠𝐮𝐞𝐦𝐚, marque un tournant historique pour ce pays d’Afrique centrale. En s’engageant solennellement à ne pas briguer de mandat présidentiel et à restituer le pouvoir aux civils à travers une élection crédible et transparente, le général Oligui Nguema établit une feuille de route claire pour une transition politique exemplaire.
𝐔𝐧 𝐯𝐞𝐫𝐫𝐨𝐮𝐢𝐥𝐥𝐚𝐠𝐞 𝐜𝐨𝐧𝐬𝐭𝐢𝐭𝐮𝐭𝐢𝐨𝐧𝐧𝐞𝐥 𝐢𝐧𝐞́𝐝𝐢𝐭:
L’un des aspects les plus remarquables de cette nouvelle constitution gabonaise est l’instauration d’un verrou constitutionnel empêchant toute personne d’exercer plus de deux mandats présidentiels. Ce verrou est directement placé sous la garantie de l’armée, qui se réserve le droit d’intervenir en cas de tentative de modification de cet article. Ce mécanisme, inédit en Afrique, vise à prévenir les dérives autoritaires et les manipulations constitutionnelles qui ont souvent caractérisé la gouvernance dans plusieurs pays du continent.
𝐔𝐧𝐞 𝐭𝐫𝐚𝐧𝐬𝐢𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐪𝐮𝐢 𝐢𝐧𝐭𝐞𝐫𝐫𝐨𝐠𝐞 𝐥𝐚 𝐆𝐮𝐢𝐧𝐞́𝐞:
Cette approche gabonaise soulève des questions sur la transition en cours en Guinée, dirigée par le 𝐆𝐞́𝐧𝐞́𝐫𝐚𝐥 𝐌𝐚𝐦𝐚𝐝𝐢 𝐃𝐨𝐮𝐦𝐛𝐨𝐮𝐲𝐚. Arrivé au pouvoir en septembre 2021 après avoir renversé 𝐀𝐥𝐩𝐡𝐚 𝐂𝐨𝐧𝐝𝐞́, accusé d’avoir modifié la constitution pour briguer un troisième mandat, le 𝐆𝐞́𝐧𝐞́𝐫𝐚𝐥 𝐃𝐨𝐮𝐦𝐛𝐨𝐮𝐲𝐚 s’est également engagé à remettre le pouvoir aux civils. Cependant, le processus reste marqué par des tensions et des incertitudes quant à l’échéancier électoral et les réformes constitutionnelles.
Contrairement au Gabon, où l’armée se positionne comme un arbitre garant de la stabilité constitutionnelle, la transition guinéenne n’a pas encore proposé de mécanisme similaire pour protéger la future constitution contre des modifications opportunistes. Cette différence soulève des interrogations sur la pérennité des réformes promises en Guinée et la possibilité de garantir une alternance démocratique durable.
𝐋𝐞 𝐫𝐨̂𝐥𝐞 𝐝𝐞 𝐥’𝐚𝐫𝐦𝐞́𝐞 : 𝐆𝐚𝐫𝐚𝐧𝐭 𝐨𝐮 𝐚𝐜𝐭𝐞𝐮𝐫 𝐩𝐨𝐥𝐢𝐭𝐢𝐪𝐮𝐞 ?
Le cas gabonais met en lumière un rôle ambivalent de l’armée en Afrique. D’un côté, elle peut apparaître comme un garant de la stabilité et de la démocratie, comme le suggère le verrou constitutionnel instauré par 𝐎𝐥𝐢𝐠𝐮𝐢 𝐍𝐠𝐮𝐞𝐦𝐚. De l’autre, elle peut être perçue comme un acteur politique dominant, risquant de s’imposer au détriment des institutions civiles.
En Guinée, cette dualité est également palpable. Si le 𝐂𝐍𝐑𝐃 (𝐂𝐨𝐦𝐢𝐭𝐞́ 𝐍𝐚𝐭𝐢𝐨𝐧𝐚𝐥 𝐝𝐮 𝐑𝐚𝐬𝐬𝐞𝐦𝐛𝐥𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐩𝐨𝐮𝐫 𝐥𝐞 𝐃𝐞́𝐯𝐞𝐥𝐨𝐩𝐩𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭) a promis une transition inclusive, certains acteurs politiques et de la société civile craignent que l’armée conserve une influence excessive sur les institutions après la transition.
𝐕𝐞𝐫𝐬 𝐮𝐧𝐞 𝐜𝐨𝐧𝐯𝐞𝐫𝐠𝐞𝐧𝐜𝐞 𝐨𝐮 𝐮𝐧𝐞 𝐝𝐢𝐯𝐞𝐫𝐠𝐞𝐧𝐜𝐞 ?
Les transitions gabonaise et guinéenne offrent des leçons importantes pour l’avenir de la gouvernance en Afrique. Alors que le Gabon innove avec une constitution verrouillée par l’armée, la Guinée doit encore définir clairement les mécanismes qui garantiront la stabilité institutionnelle après la transition.
Pour que ces transitions aboutissent à des démocraties solides, il est essentiel que les processus soient transparents, inclusifs et respectueux des aspirations populaires. Le défi commun reste d’instaurer des institutions fortes, capables de résister aux pressions politiques et de garantir une alternance pacifique.
𝐂𝐨𝐧𝐜𝐥𝐮𝐬𝐢𝐨𝐧:
La démarche du 𝐆𝐞́𝐧𝐞́𝐫𝐚𝐥 𝐎𝐥𝐢𝐠𝐮𝐢 𝐍𝐠𝐮𝐞𝐦𝐚 au Gabon, bien que controversée, pourrait inspirer d’autres transitions africaines, y compris celle de la Guinée. Cependant, chaque pays doit trouver un équilibre entre innovation constitutionnelle et respect des dynamiques politiques locales. En fin de compte, le véritable test réside dans la capacité de ces transitions à poser les bases d’une gouvernance démocratique et durable.
Mamadou Diouldé Sow