Il est pour le moins étrange qu’alors que l’opinion médiatique s’inquiète de la santé en lien avec les conditions de détention de Mandian Sidibé, ancien directeur de l’Office guinéen de publicité (OGP) limogé pour mauvaise gestion, ce dernier choisisse de ne pas affronter seul les conséquences de ses actes. Certes, comme le dit l’adage, « on ne mange pas seul », mais tenter d’entraîner dans sa chute des personnalités du même corps de métier en l’absence de preuves solides relève davantage d’une stratégie désespérée que d’une démarche crédible.
Depuis ses auditions devant la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF), et depuis son lieu d’incarcération, Mandian Sidibé cite des personnalités influentes, telles que Thierno Mamadou Bah, conseiller du président Mamadi Doumbouya, Souley Thianguel Bah, secrétaire général du ministère de l’Information et de la Communication, et Mme Koné Adèle Camara, chef de cabinet du même département. Ces accusations, toutefois, manquent de fondements et s’avèrent particulièrement surprenantes au regard des efforts que ces personnes ont déployés, connaissant sa santé fragile, pour qu’il puisse bénéficier de soins adéquats tout en répondant des accusations de détournement de fonds publics.
Mme Koné Adèle Camara, dès la première audition du DG de l’OPG, Mandian Sidibé à la police, s’est préoccupée davantage de sa santé qu’elle sait vacillante que des charges pesant contre lui, espérant que la justice prenne en compte son dossier médical, au cas où il serait déféré à la Maison centrale comme c’est le cas de tous les « clients » de la CRIEF. Cependant, les précédents refus de la CRIEF d’autoriser des évacuations sanitaires pour des personnalités telles que l’ancien Premier ministre Ibrahima Kassory Fofana avaient déjà limité ses espoirs. C’est pourtant elle que Mandian Sidibé tente d’incriminer dans sa gestion, même si elle ne dispose d’aucune signature à l’OGP. Il n’aura tout au plus réussi qu’à ternir sa réputation par ses accusations tirées par les cheveux, ce qui est déjà mechant. Très ! Pourtant, au nom d’une confraternité qui lui retombe malheureusement dessus aujourd’hui, cette dame n’a eu de cesse de conseiller Mandian Sidibé sur certains actes hasardeux dont le retard de paiement des travailleurs, entre autres.
De son côté, Thierno Mamadou Bah un autre journaliste et confrère de Mandian Sidibé, malgré son rôle de conseiller à la présidence et de président du Conseil d’administration de l’OGP, ne peut influer sur une justice qui entend appliquer une stricte égalité de traitement. Au contraire, son poste le rend tout à fait inapte à intervenir dans cette affaire, même si par ailleurs lui également s’inquiétait de l’état de santé fragile connu du prévenu.
Il convient également de rappeler que ni Mme Koné Adèle Camara, membre du Conseil d’administration, ni Thierno Mamadou Bah, président du CA, n’ont de pouvoir de gestion sur les finances de l’OGP. Ce rôle incombe exclusivement au directeur général, qui seul dispose du cachet et de la signature nécessaires. Il est connu que le Conseil d’administration vote le budget que le directeur général exécute. Si des défaillances ont eu lieu, elles relèvent davantage d’un défaut de contrôle que d’une implication active des administrateurs. Et rien ne prouve pour le moment que des contrôles n’ont pas eu lieu.
Malgré tout, Mandian Sidibé persiste à accuser sans fournir de preuves concrètes. Ce comportement alimente la défiance de ses confrères mais aussi les attaques de ses adversaires politiques — c’est de bonne guerre —, lesquels n’ont rien à faire pour aggraver sa situation : il leur facilite la tâche lui-même. Ceux qu’il accuse, pourtant, ne partagent ni ses responsabilités dans la gestion de l’OGP, ni les erreurs qui lui sont reprochées.
La gestion des biens publics, par sa nature sacrée, exige une transparence totale. Si Mandian Sidibé espère s’en sortir en impliquant des personnalités proches du président Mamadi Doumbouya et jugés intouchables, il ignore que la justice et l’opinion publique exigent des preuves irréfutables, sans lesquelles ses accusations ne sont que fuites en avant et distractions !
En définitive, Mandian Sidibé ferait mieux de se ressaisir. En cherchant à incriminer des innocents pour masquer ses propres responsabilités, il risque de perdre le soutien des médias, de sa famille, et de ses confrères, déjà ébranlés par ses actions. La justice et le contribuable guinéen n’attendent que des réponses claires sur sa gestion, et non des manœuvres dilatoires, comme diraient les juristes.
Il gagnerait enfin à ne pas se laisser instrumentaliser dans une lutte de clans autour du Général Mamadi Doumbouya. Car il n’est aimé ni de ce clan, ni des politiques qui veulent lui régler leurs comptes, et il risque de perdre le soutien de la corporation des journalistes, qui, eux, se préoccupent de son état de santé précaire. Sans ces médias et sa famille, il resterait irrémédiablement seul. ll est donc temps qu’il assume pleinement ses actes, car dans cette bataille qu’il sème, il ne lui reste qu’une certitude : sa solitude. CQFD.
Abdoulaye Sankara, journaliste