Le ministre porte-parole du gouvernement guinéen, Ousmane Gaoual Diallo, vient d’inaugurer « Guinée Gouve », un portail public d’informations placé sous son autorité directe. Selon ses propres termes :
« Nous avons pensé Guinée Gouve comme une réponse claire et efficace à une exigence légitime de nos concitoyens : l’accès à une information fiable, instantanée et vérifiée sur l’action publique. L’information gouvernementale a parfois été mal interprétée et souvent parasitée par la désinformation. Aujourd’hui, chaque Guinéenne et chaque Guinéen doit pouvoir être tenu au courant de l’actualité gouvernementale sans filtre, sans interférence. »
Un bel engagement, certes. Mais question : qu’advient-il alors de la cellule de communication du gouvernement, officiellement placée sous l’autorité du Premier ministre et dont le porte-parole du gouvernement a la charge de l’animation ? Est-elle simplement contournée, reléguée ou purement et simplement dissoute ? Si oui, sur quelle base juridique, sachant que l’existence légale de cette cellule elle-même semble sujette à caution, faute d’un décret officiel la consacrant ?
Et que dire de :Guinée Gouve » ? Son décret de création, son organigramme et son mode de financement restent eux aussi dans l’ombre. S’agit-il d’une réforme bien pensée ou d’un fait du prince, décidé dans un entre-soi ministériel ?
Autre interrogation, plus politique celle-ci : cette multiplication des structures de communication gouvernementale traduit-elle une mésentente entre le Premier ministre Amadou Oury Bah et son porte-parole Ousmane Gaoual Diallo ? Leur passé conflictuel au sein de l’UFDG, autrefois un secret de Polichinelle, refait-il surface dans les coulisses du pouvoir ? Tout porte à croire que les deux hommes cohabitent dans une ambiance de méfiance, si ce n’est de rivalité larvée.
Et quid des employés de la cellule de communication du gouvernement, engagés sous contrat avec la Primature ? Seront-ils remerciés, transférés, ou maintenus dans une cohabitation administrative aussi floue que leur avenir ? D’ailleurs, qui finance ou financera ces deux entités gouvernementales censées accomplir une mission identique ? Une mission déjà portée, rappelons-le, par la RTG, l’AGP et le quotidien national Horoya.
Trop de communication ne risque-t-il pas de tuer la communication ? En 2025, année électorale censée marquer la fin de la transition, cette surenchère informationnelle ne conduira-t-elle pas à une cacophonie gouvernementale sans précédent ? Une chose est sûre : la bataille de la communication est déjà lancée. Et comme chacun le sait, la communication, c’est le nerf de la guerre.
Entre volonté de transparence et lutte d’influence en interne, la création de « Guinée Gouve » soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. Réorganisation stratégique ou guerre d’ego ? L’avenir dira si cette nouvelle structure servira véritablement l’intérêt public ou s’il ne sera qu’un terrain supplémentaire d’affrontements politiques sous couvert d’information. Wait and see…
Abdoulaye Sankara, journaliste
