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« Mamadi Doumbouya est en train d’installer méthodiquement une dictature implacable dans notre pays », Alpha Saliou Wann

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Mamadi Doumbouya est en train d’installer méthodiquement une dictature implacable dans notre pays. Après les partis politiques et la société civile, il s’attaque désormais aux médias.
Pour rappel, au début des années 90, c’est le puissant mouvement de grève de la jeunesse estudiantine qui a fracassé la digue du système et ouvert ainsi les vannes des réformes politiques et sociales : multipartisme politique intégral, multipartisme syndicale, libéralisation de la presse privée etc. Le général Lansana Conté a eu la sagesse de céder sur tous les points de revendications.

Pour autant, le système ne s’avoue pas vaincu. Ses éléments les plus zélés ont tenté de bâillonner la jeune presse de notre pays qui était un danger mortel pour la pérennité du pouvoir autoritaire. Ils ont trouvé en face des journalistes courageux qui n’ont pas cédé un iota de l’espace de liberté chèrement acquis par la jeunesse guinéenne fer de lance de la lutte pour l’instauration de la démocratie et l’État de droit dans notre pays. Sans être exhaustif, je cite quelques uns : on a l’emblématique doyen de la presse Souleymane Diallo, El Béchir Diallo, Abdoulaye Condé, Abdoulaye Top Sylla, Kayoko Doré, Saliou Samb, Abdoulaye Sankara, feus Alassane Diomandé, Williams Sassine, Bah Mamadou Lamine, Biram Sakho, Hassane Abraham Keita, Aboubacar Condé, Siaka Kouyaté, Sékou Amadou, Prosper Doré, Jean Baptiste Kourouma (premier journaliste d’investigation qui révéla au public les grands scandales financiers de l’époque), Thierno Diallo dit Bebel… et un certain Boubacar Yacine Diallo.
Une mention spéciale pour le doyen Bâ Mamadou qui a été le premier à créer un journal « La Nouvelle République ». Il disait qu’il n’avait pas besoin d’un agrément pour exercer un droit fondamental. C’est lui qui a ouvert la voie à la libéralisation officielle de la presse privée en Guinée.
Ils ont tenu bon face aux intimidations, arrestations et menaces. Ils ont fait preuve de courage et de détermination pour défendre l’idéal de liberté d’expression dans notre pays dans des conditions difficiles. On avait une presse engagée qui n’a rien à voir celle d’aujourd’hui.

La presse a joué un rôle essentiel durant ces trente dernières années pour la conquête de nos libertés et droits fondamentaux. C’est une rupture radicale avec le système dictatorial instauré par le pouvoir PDG qui avait privé les Guinéens de tous leurs droits acquis sous la colonisation : multipartisme politique et syndical, liberté de la presse etc.
Les nouvelles générations n’ont pas connu cette sombre période de notre histoire où être surpris en possession d’un journal étranger, notamment Jeune Afrique, pouvait mener à la prison. Les Guinéens étaient coupés du monde sur le plan informationnel. Ils n’avaient droit qu’à la propagande des médias d’État. Ils ne savaient rien de ce qui se passait dans le monde. Les séquelles de cet isolement sont encore vivaces.

Nous ne pouvons accepter un retour en arrière. Au commencement de nos luttes au début des années 90, Mamadi Doumbouya, Dansa Kourouma et autres Mory Condé n’étaient que des gamins de l’école primaire. Ils ne pourront donc remettre en cause le multipartisme politique intégral, la liberté de presse et tous nos acquis démocratiques obtenus au prix de douloureux sacrifices.
Il faut sonner le tocsin de la mobilisation de la société guinéenne contre ces apprentis dictateurs.

Aujourd’hui, qui veut se priver de l’internet ? Qui peut se satisfaire d’une presse privée totalement inféodée au pouvoir ? Qui veut vivre dans une ambiance de terreur où la moindre expression contre le pouvoir est un danger ?
Agissons maintenant avant qu’il ne soit trop tard.
Alpha Saliou Wann